Méditation
Dieu a choisi de nous faire attendre
Tout le temps de l’Avent.
Moi, je n’aime pas attendre
Dans les files d’attente.
Je n’aime pas attendre mon tour
Je n’aime pas attendre le train
Je n’aime pas attendre pour juger
Je n’aime pas attendre le moment
Je n’aime pas attendre un autre jour
Je n’aime pas attendre
Parce que je n’ai pas le temps.
Pas le temps d’attendre :
Je ne vis que dans l’instant.
Tu le sais bien d’ailleurs
Tout est fait pour m’éviter l’attente :
Les cartes bleues et les libres services
Les ventes à crédit
Les distributeurs automatiques
Les coups de téléphone
Les photos à développement instantané,
Les mails,
La télévision
Les flashes à la radio
Je n’ai même plus besoin d’attendre les nouvelles :
Elles me précèdent.
Mais toi, Dieu,
Tu as choisi de te faire attendre
Le temps de tout un Avent.
Parce que tu as fait de l’attente
Le face-à-face avec ce qui est caché.
Parce que seule l’attente
Réveille l’attention
Et que seule l’attention
Est capable d’aimer.
Tout est donné dans l’attente.
Et pour toi, Dieu,
Attendre c’est prier.
Texte biblique:
Luc 3, 1-14
Jean lance un appel à changer de vie
1Maintenant, Tibère est empereur depuis 15 ans. Ponce Pilate est préfet de Judée. Hérode Antipas gouverne la Galilée. Philippe, le frère d’Hérode Antipas, gouverne l’Iturée et la Trachonite. Lysanias gouverne l’Abilène. 2Hanne et Caïphe sont grands-prêtres. À ce moment-là, dans le désert, Dieu adresse sa parole à Jean, le fils de Zakarie, 3et Jean va dans toute la région du Jourdain. Il lance cet appel : « Faites-vous baptiser, pour montrer que vous voulez changer votre vie, et Dieu pardonnera vos péchés. » 4En effet, dans le livre du prophète Ésaïe, on lit :
« Quelqu’un crie dans le désert :
Préparez la route du Seigneur !
Faites-lui des chemins bien droits !
5On remplira tous les ravins,
on aplatira toutes les montagnes et toutes les collines.
Les tournants de la route deviendront droits,
on remettra les mauvais chemins en bon état,
6et tous verront que Dieu veut les sauver ! »
7Des foules viennent pour que Jean les baptise. Jean leur dit : « Espèce de vipères ! La colère de Dieu va venir, et vous croyez que vous pouvez l’éviter ? Qui vous a dit cela ? 8Faites donc de bonnes actions pour montrer que vous avez changé votre vie ! Ne vous mettez pas à penser : “Notre ancêtre, c’est Abraham.” Oui, je vous le dis, vous voyez ces pierres, ici. Eh bien, Dieu peut les changer pour en faire des enfants d’Abraham ! 9Déjà la hache est prête à attaquer les racines des arbres. Tous les arbres qui ne produisent pas de bons fruits, on va les couper et les jeter dans le feu ! »
10Alors les foules demandent à Jean : « Qu’est-ce qu’il faut faire ? » 11Il leur répond : « Celui qui a deux vêtements doit en donner un à celui qui n’en a pas. Celui qui a de la nourriture doit en donner à celui qui n’en a pas. »
12Des employés des impôts viennent aussi pour que Jean les baptise. Ils demandent à Jean : « Maître, qu’est-ce qu’il faut faire ? » 13Jean leur répond : « Vous savez ce qu’on doit payer pour l’impôt. Ne demandez pas plus. »
14Des militaires demandent à Jean : « Et nous, qu’est-ce que nous devons faire ? » Il leur dit : « Ne prenez d’argent à personne, ni par la force, ni par le mensonge. Contentez-vous de votre salaire. »
Temps de parole
Ponce Pilate,
Hérode, Philippe,
Lysanias,
Hanne et Caïphe :
la galerie des portraits est au grand complet. On dirait la photo du G6, version an 15 du règne de Tibère.
Tout le monde est à son poste. Tous les rôles sont tenus. Le monde tient en équilibre. Equilibre subtil, bien sûr, tout le monde est prêt pour la photo. « Attention : on ne bouge plus ».
Et pendant ce temps,
Pendant que le monde politico-religieux essaie de ne plus bouger pour que ça tienne,
jean le Baptiste est en mouvement.
Il bouge,
il remue,
il parcourt toute la région,
il est en marche.
Et évidemment il arrive au milieu de la photo comme un trouble-fête.
Un trouble-fête qui échappe aux dosages subtils qui ont permis aux grands de ce monde d’en arriver là.
Un trouble-fête qui n’entre pas dans les calculs et les marchandages avec lesquels on se partage le monde en zones d’influences,
Un prophète qui est ailleurs.
Le prophète est au désert.
Quand l’ordre du monde se croit éternel
Quand le pouvoir se considère comme immuable
Le désert reste le lieu de l’imagination.
Au désert la terre est vide et tout est à inventer
Depuis le désert, on voit le monde comme un chantier et non comme un pouvoir à exercer.
Mais il y a plus que cela.
Dans l’esprit des Israélites, le désert, on s’en souvient, c’est le lieu d’une expérience décisive. C’est le moment où le peuple, après être sorti d’Egypte, sorti de la captivité, va mettre 40 ans pour finalement arriver en Terre Promise.
Et ce désert, les prophètes en parleront toujours comme d’une époque forte. Essentielle. Non pas que les prophètes auraient été particulièrement nostalgiques et que pour eux, le bon vieux temps, c’était évidemment avant… mais c’était l’époque où le peuple dépendait uniquement de son Dieu et à certains égards, lui était plus fidèle que quelques siècles plus tard, lorsque le peuple s’est sédentarisé, installé.
Le désert, c’est un peu le lieu de la relation idéale entre Dieu et son peuple.
Et puis le Jourdain,
c’est évidemment la rivière qu’il a fallu passer un jour,
la rivière qu’il a fallu traverser pour avoir accès au pays de la promesse.
Et c’est dans ce Jourdain que Jean-Baptiste baptise.
Du coup, le signe est très fort.
Qu’est-ce que ça veut dire ? ça veut dire qu’il y a une nouvelle « terre promise » dans laquelle il faut entrer aujourd’hui
Il ne suffit pas de dire « mon arrière, arrière, arrière grand-père … s’appelait Abraham, sous –entendu ça doit suffire ».
Il y a une nouvelle terre promise dans laquelle il faut entrer : celle de l’Esprit avec un grand « E »
Voilà le chantier auquel Jean le baptiste appelle.
Ce qui peut paraître étrange, ce sont les images utilisées qu’il va chercher chez Esaïe pour les reprendre à son compte.
Faites-lui des chemins bien droits !
5On remplira tous les ravins,
on aplatira toutes les montagnes et toutes les collines.
Les tournants de la route deviendront droits,
Voilà des images extrêmement violentes.
Des images qui nous font penser à d’autres images
Vues à la télévision :
Un tank israélien qui entre dans Gaza
Un bulldozer qui creuse la forêt vierge pour faire une autoroute à travers l’Amazonie
Un quartier populaire entièrement rasé à Pékin pour les jeux olympiques
Et ça paraît totalement inadéquat pour annoncer le Jésus qu’on va connaître par la suite.
Parce que si Jésus avait été un chef de guerre
Si Jésus avait été un prince de ce monde, assoiffé de pouvoir et d’argent
Si Jésus avait été un patron autoritaire à l’égo totalement démesuré…
Alors ces paroles du prophète Esaïe auraient été adéquates,
Mais ce n’est pas le cas.
Le Jésus qui va naître va naître d’une toute jeune fille qui n’est pas mariée.
Il va naître en voyage.
Et il va venir au monde dans des conditions extrêmement modestes !!!
Non, décidément, ces images ne collent pas … à moins que !
A moins que nous cherchions ailleurs qu’au rayon du génie civil.
Le baptiste ne dit pas « on va poutser la Galilée pour la naissance de Jésus » ! Il dit « faites-vous baptiser pour montrer que vous voulez changer votre vie ».
Jean-Sébastien Bach le dit admirablement bien dans cette cantate 132 : « Si tu souhaites être appelé enfant de Dieu, vient de chanter Christophe Gindraux, prépare dès aujourd’hui la route de la foi pour le Seigneur, enlève les collines et les hauteurs qui sont sur son chemin ! Passe au rouleau les lourdes pierres du péché. »
Aplanir les chemins, c’est aplanir quelque chose à l’intérieur de soi.
Passer les pierres au rouleau, à l’intérieur de soi.
Faire de la place, c’est à l’intérieur de soi
C’est à l’intérieur de soi qu’il faut faire une percée
Pour que les hommes voient que Dieu vient les sauver.
Et puis il y a peut-être un deuxième sens : celui de « mettra à plat »
Remettre à plat.
C’est enlever tout ce dont on s’est chargé,
Tout ce qu’on croit savoir
Tout ce qu’on croit comprendre
Jean le Baptiste indique deux remises à plat possibles :
D’abord, notre rapport à la richesse. Quand les gens demandent … « Qu’est-ce qu’on doit faire« , il leur répond » Que celui qui a deux tuniques en donne une à celui qui n’en a point. Et que celui qui a de quoi manger fasse de même« . Donc remise à plat en vue du partage … de la solidarité.
Et puis – et juste avant la naissance de Jésus c’est peut-être l’élément le plus important – remise à plat de mon image de Dieu, de ma conception de Dieu. Si pour moi, Dieu n’est que force et puissance, gloire et royauté, Dieu des armées. Il dit et la chose existe … je n’arriverai pas à accueillir un « fils de Dieu » qui naît dans une étable.
Sans remise à plat, la foi ne consiste qu’à réciter des définitions toutes faites,
Elle n’a rien de neuf à dire pour notre temps,
Elle n’est qu’un monument.
Jean Baptiste vient mettre la foi en mouvement.
Parce que Jésus ne répond jamais aux définitions.
Il n’est ni dans les catégories,
Ni dans les schémas,
Ni dans les cadres,
Ni dans les dogmes,
Ni dans les idéologies.
Parce qu’il est, dit Jean, au milieu de nous quelqu’un que vous ne connaissez pas encore …
Amen.
Tous les préparatifs à Noël
Ont l’immense mérite de nous rappeler
Que la foi chrétienne est une religion joyeuse.
On y parle de péché, c’est vrai
Mais c’est pour dire qu’il est enlevé.
On y parle de jugement, c’est aussi vrai
Mais c’est pour dire qu’il est anéanti.
On y parle de mort, c’est toujours vrai
Mais c’est pour dire que le dernier mot lui a été enlevé.
Il est vrai que les porteurs de toutes ces bonnes nouvelles
Ne sont pas toujours très drôles.
Pasteurs, prêtres, mes frères,
Porteurs de la parole de libération et de joie
Nous faisons pas mal de dégâts
Avec nos airs trop noirs et nos bonnes nouvelles en deuil.
Mais tout le mon a été averti, non ?
Le trésor est porté dans des vases de terre !
Jetez le vase, bonnes gens,
Mais gardez le trésor.
En tout cas, veuillez bien noter
Que quiconque se réclame de la foi chrétienne
Et vous inspire pourtant ennui et tristesse
Doit être considéré
Comme une erreur ou un accident.
Au-delà des maladresses des serviteurs
Il faut entendre la voix du Maître.
Au-delà des ombres que répandent les hommes
Il faut accueillir,
À cœur ouvert,
Le lumineux cortège de la Bonne Nouvelle.