Texte méditatif d’entrée

Dieu, en deçà et au-delà de ma vie…

Parfois je dis Dieu, ou La Vie, ou La Source…,

Parfois je peux dire MON DIEU !

Je cherche et je scrute…

Je m’efforce de relier les morceaux de ma vie…

Je me tiens au carrefour du peu que je comprends et de tout ce qui m’échappe…

Je suis ce carrefour.  Ce carrefour où parfois je me sens, je me sais rencontré, rejoint par le Souffle…

Et je soupire… Je suis tendu vers le Souffle, scrutant la source. Je suis tendu vers Toi…  (silence)…

… et j’espère… follement peut-être, mais j’espère ton Souffle…. Un signe… à travers la musique ce soir, peut-être… un signe qui m’encourage…

Dans ce monde où tout s’entrechoque, où les signes de justice et de paix se mêlent aux actes d’injustice et de violence – et, à mes yeux, ils paraissent si nombreux aujourd’hui….

                            Je soupire….

Dans cette ville, notre ville, où la violence peut jaillir et jaillit parfois de façon si incompréhensible

Dans cette ville, notre ville, où la marge fait de plus en plus peur et nous pousse dans le désarroi,

Dans cette ville, notre ville, où nous sommes pris dans la tenaille du punir ou du guérir…

                            Je soupire…

Dans ma vie, où je discerne assez clairement ce qui est désordre et handicap, inimitié et colère,

Mais où je connais et rencontre aussi joie et bonheur, service et pardon,

Dans ma vie où tout est entremêlé, imbriqué…

                            Je soupire…

… Je soupire après toi et j’espère

Tout mon être est tendu vers toi et je t’attends chaque jour…

Lecture biblique

En écho au psaume 25 « je suis tendu vers toi de tout mon être » que Bach a si magnifiquement mis en musique et qui conduira notre temps de méditation en cette fin de dimanche, j’ai choisi de relire le début de l’évangile de Marc prolongé ou illustré par deux images.

Après sa reconnaissance publique et son baptême par Jean le Baptiseur, Jésus commença par dire :

« Le temps est accompli, le moment est venu : l’heure où tout se joue est là ! Ce royaume de Dieu que vous attendez… il est à la porte, à votre porte : demi-tour donc, changez votre regard !

Apprenez à faire confiance à la surprenante nouvelle de cette proximité, car elle est bonne, la nouvelle !

…C’est quoi le Royaume de Dieu ? C’est comme un jardinier qui sème des graines : une fois que c’est fait, il peut dormir ou rester éveillé, à sa guise, la nuit comme le jour…

Sans trop bien qu’il sache comment, la graine germe et puis pousse. Presque automatiquement, la terre produit du fruit : d’abord de petites feuilles, et puis, s’il s’agit de céréales, un épi, et puis du blé plein l’épi. Et c’est seulement lorsque le grain est mûr que notre jardinier reprend son travail : c’est que le temps de la moisson est venu !

Vous voulez une autre image pour parler encore de ce Royaume ?

C’est de nouveau comme une graine, mais comme la plus petite des graines que vous connaissez : disons la graine de moutarde ! Mini-mini, au départ, elle pousse et  voilà qu’elle devient la plus grande des plantes du jardin. Elle fait des branches, grandes, et les oiseaux peuvent même les utiliser pour y construire leur nid, bien à l’ombre ! »

Temps de parole

Temps de la passion… temps de germination

Temps de la passion : ne me laisse pas seul

Temps de la germination et d’une certaine mort : je suis seul, je suis seule !

Le temps de la passion serait-il aussi le temps de la germination ?

Temps où nous poussons tout notre être – comme le dit le psaume – vers la source, le sens, la vie, Dieu !

Temps où les choses se font à l’intérieur de nous, pour grandir, mûrir et à l’image des plantes et des arbres, pour aboutir au fruit

Temps de maturation – et donc de souffrance – d’abandon, parfois de nos idéaux,

et de lâcher-prise souvent face à nos certitudes !

Et voilà que cela débouche sur autre chose : le bout du tunnel, une lumière, un éclairage différent, un autre regard… un changement en nous et puis peut-être aussi autour de nous

N’y a-t-il pas une mort nécessaire pour qu’il y ait une vie nouvelle, une résurrection ? la graine ne doit-elle pas mourir pour qu’il y ait croissance ?

(Silence)

Nous demander ce qui doit mourir en nous pour qu’une place soit faite à quelque chose de neuf, d’inédit, d’inattendu, de vivant ou de re-vivant.

S’abandonner, lâcher prise, laisser faire le travail de la graine, accepter de perdre pour aller au-delà, lâcher pour retrouver autrement. Faire confiance, en somme.

L’autre jour, mon attention a été accrochée par une affiche placée au mur d’un lieu d’église : elle portait une espèce de poème-prière qui évoquait toute sorte de situations difficiles face auxquelles nous étions invités – et c’est ainsi que se terminait toutes les premières phrases – invités à serrer les dents ! « il faut serrer les dents ! »…  Et aujourd’hui, je n’en suis plus sûr du tout… même si j’ai aussi reçu ce genre d’éducation dans mon jeune âge. On a peut-être confondu résistance et crispation.

« Etre tendu vers… » ne veut pas dire être crispé. Résister ne veut pas dire se replier, se défendre, s’enfermer !

Paradoxalement, cette bonne nouvelle annoncée par Jésus – à la suite de cette cantate où le psalmiste dit son abandon, son lâcher-prise, sa disponibilité, son être tout entier tourné vers la source – ce soupir, c’est en hébreu, son désir ardent – RESISTER, C’EST S’OUVRIR !

La force n’est pas dans les mâchoires crispées, les dents serrées, les boulons bloqués, la carapace béton derrière laquelle on se replie, l’abri anti-monde.

La force est probablement beaucoup plus dans le vulnérable, le fragile apparent.

Les scientifiques qui se sont penchés et qui se penchent sur nos origines et l’évolution de la vie sur terre, nous apprennent ou nous rappellent que la plus grande révolution qui s’est produite dans la grande chaîne de la vie, c’est le passage du crustacé au vertébré. Vous savez que les mollusques pour pouvoir grandir, sont obligés à plusieurs reprises de quitter leur carapace ou leur coquille, devenue trop petite, pour en secréter une nouvelle, à leur mesure. Et pendant ce temps, ils courent un grand risque : pendant un temps, perdre leur protection. Or, la grande révolution, a consisté, dans la nature, à ce que l’être vivant quitte le système carapace où le dur est à l’extérieur et le mou à l’intérieur pour passer à un système inverse où la partie résistante est à l’intérieur, c’est l’ossature, et la partie vulnérable à l’extérieur, notre peau, notre chair, nos muscles.

Or, dit Jung, au niveau de notre psychisme, nous sommes invités à la même révolution ou conversion : devenir fort à l’intérieur en reconnaissant notre fragilité, notre vulnérabilité, notre faiblesse extérieure.

La force est à l’intérieur. La cantate nous le rappelle ce soir par ce psaume 25, Jésus nous le dit en parlant de la graine.

Nous avançons dès lors comme en navigation où l’on ne s’oppose pas aux vents frontalement sous peine de déchirer notre voilure, mais en les utilisant pour qu’ils deviennent dynamique et puissance d’avancement.

Le lâcher prise du psaume n’est pas dans un laisser aller à la va comme je te pousse, ni un sauve qui peut, ni une fuite, mais un desserrement, une décrispation, un abandon, un acte de confiance. Celui-là même de la graine mise en terre qui a et qui voit son avenir dans l’humus même où elle est déposée et où elle va s’enraciner. C’est Vendredi Saint et c’est déjà la bonne nouvelle de Pâques !

Texte méditatif final

A cause de ta fidélité, garde nous des jugements globalisants, de la pensée unique et du sauve-qui-peut égoïste

A cause de ta fidélité, préserve-nous et ne nous laisse pas tomber dans la tentation des solutions finales et définitives, mais accompagne-nous dans la recherche commune de l’équilibre social, du droit des laissés pour compte, de la défense du petit

A cause de ta fidélité, renouvelle

Notre attention à nous-mêmes pour que nous parvenions à nous accepter et à nous aimer nous-mêmes sans mauvaise conscience

Notre attention à l’autre différent pour que nous apprivoisions cette différence et qu’elle devienne un cadeau

Notre attention à celles et ceux avec qui nous vivons pour qu’ils soient toujours capables de nous étonner et de nous renouveler

A cause de ta fidélité, continue à mener ce combat avec nous…, ce combat sans arme, sans agression ni contre nous, ni contre l’autre, mais pacifique pour la paix, la paix de chaque jour, la paix de chaque nuit.  (amen)

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