Texte méditatif d’entrée

Moi, je te dis
Que le temps coule
Sur nos eaux troubles
Et recouvre nos heures
Du brouillard quotidien

Va fouiller ta vie
La dominante y est le gris,
Le bémol, l’ordre, la sourdine
La symétrie, le nivellement,
Le travail

Moi je te dis
Qu’il faut créer des fêtes
Pour le temps présent
Qui jalonnent les jours
Et mettent en échec la monotonie
Et transfigurent le quotidien
Qui laissent sourdre l’extraordinaire
Et qui cassent le temps

Des fêtes pour le temps présent
Afin de retrouver le rythme

Et pointera le jour, là-bas
Et le bateau touchera les rivages d’or
Où la vie s’étale en nappes d’éternité.

Dans les cris rauques,
Dans les râles
Dans les clameurs
Je chercherai la fête

Dans l’ambiguïté de mes jours
Dans la boue des déchirures
Dans le visage refusé
Je chercherai la fête

La mort peut venir
Creuser ses ornières
Et pulvériser le scintillement de mes couleurs
Je continuerai à chercher

J’irai fouiller le ventre des étoiles
Je reviendrai avec des cargaisons d’espoir
Et les mains baignées de lumière

Je la chercherai, la fête
Et je la trouverai.

Texte biblique : Psaume 28

1De David.

SEIGNEUR, mon solide rocher, je fais appel à toi,
ne reste pas sourd à mes cris !
Si tu ne me réponds pas, je vais ressembler à ceux qui descendent dans la tombe.
2Je t’en supplie, écoute-moi quand je crie vers toi,
quand je lève les mains vers le lieu très saint de ton temple.
3Ne me traite pas comme les gens mauvais,
ni comme ceux qui font du mal.
Avec leurs amis, ils parlent gentiment, mais leur cœur est méchant.
4Fais-leur payer leurs actes et leurs crimes !
Agis avec eux comme ils ont agi, rends-leur ce qu’ils méritent !
5Ils ne font pas attention aux actions du SEIGNEUR,
ni au travail de ses mains.
Alors, que le SEIGNEUR les détruise, qu’il ne les relève pas !
6Merci au SEIGNEUR !
Il m’a écouté quand j’ai crié vers lui.
7Le SEIGNEUR me protège avec puissance, il est mon bouclier.
Je lui ai fait confiance, il est venu à mon aide.
Mon cœur danse de joie, je remercie le SEIGNEUR en chantant.
8Le SEIGNEUR est la force de son peuple,
il protège avec puissance le roi qu’il a choisi, il le sauve.
9Sauve ton peuple, bénis ceux qui t’appartiennent,
sois leur berger, prends soin d’eux pour toujours !

Temps de parole

Cantate pour  la Réformation.
Pas exactement la Réformation, compte tenu du calendrier mensuel de Cantate & Parole.  

Cantate de circonstance. On connaît bien le rythme de composition de Jean-Sébastien Bach et les commandes qu’on lui imposait régulièrement.

Octobre 1725. Bach est à Leipzig depuis deux ans. Le dernier jour du mois, on va fêter la Réformation. Inimaginable de célébrer cette fête sans une nouvelle composition du Maître.

Et Bach se met au travail. Puisque c’est la réformation, il choisit une orchestration un peu plus riche sans jamais céder cependant à une quelconque célébration de la Réforme. Pas question de créer une cantate à la gloire du protestantisme. Plus que jamais, ce sera Soli Deo Gloria.  A la seule gloire de Dieu.
Une nouvelle cantate à la seule gloire de Dieu.

Le Seigneur est mon soleil et mon bouclier.

Dans l’un des Psaumes les plus connus, David dit « Le Seigneur est mon berger, je ne manquerai de rien » Dans le Psaume 27, il dit « Le Seigneur est ma lumière, je n’aurai peur de personne »,
Psaume 28 : « Le Seigneur est mon bouclier ».

Le berger, c’est une image un peu passéiste, bien sûr, bucolique évidemment, mais belle.
La lumière aussi … mais le bouclier. Le bouclier n’est-il pas une image particulièrement rebutante ?

Une image qui rebute.

Nous ne sommes pas à l’époque de David et donc très éloignés des innombrables conflits qui l’ont accompagné pendant toute sa vie.
Nous ne sommes pas à l’époque de la Réforme et même si les conflits ne manquent pas de par le monde, ils ne sont pas véritablement à nos portes.  
Et au plan spirituel, nous avons parfois de la peine à faire nôtre des formules comme celle de Paul lorsqu’il déclare « Revêtez la cuirasse de la foi » !
Non décidément, le vocabulaire militaire nous rebute, nous qui nous efforçons – sans toujours y arriver d’ailleurs – de tendre la joue gauche quand on nous a copieusement baffé la droite.
Le vocabulaire de la « non-violence » nous semblerait mieux convenir à nos interrogations sur le prix des avions de combats ou le port d’arme à domicile … Nous éprouvons d’ailleurs un véritable malaise en relisant certains Psaumes, dans lesquels  David demande à Dieu de transformer ses ennemis en paillasson sous ses pieds ! (Psaume 110)

Et puis cette image nous rebute aussi parce que non seulement elle fait militaire, mais elle est terriblement « old style ». Les Romains, les Wisigoths, les Zoulous portaient des boucliers. Mais leurs boucliers aujourd’hui – ceux qui restent en tout cas – sont devenus des pièces de musée. Inoffensives. Accrochées aux murs. Ou bien à l’abri dans des cages de verre.

Et au fond, dire que  Dieu est un bouclier, n’est-ce pas donner raison à ceux qui affirment que Dieu est mort ? Qu’il est juste bon à servir d’ornement mais qu’il n’a évidemment plus d’utilité, plus aucune pertinence, plus aucune actualité.

Mais qu’on soit clairs : ce n’est pas parce que l’image d’un Dieu  « bouclier » nous paraît désuète que nous n’avons plus besoin de protection seulement nos protections nous les cherchons ailleurs.

Le bouclier « financier », par exemple. Amasser du bien – je ne dis pas « entasser maladivement » mais amasser quelques biens, faire des économies nous paraît raisonnable. Utile. Indispensable pour envisager l’avenir avec sérénité.
Et pourtant s’il est une période où faire confiance à la bourse, aux intérêts, aux actions, aux obligations, que sais-je encore semble délicat… c’est bien aujourd’hui.  
Aujourd’hui où même les produits les plus « consolidés » semblent aussi fragiles qu’un château de sable.

On a parlé de « la » crise… on aurait dû parler des crises, tant « la » crise semble s’acharner à produire des « secousses colatérales » en chaîne. La Grèce, le Portugal, l’Espagne … l’Italie : l’étau se resserre dangereusement.

Le bouclier « travail ». Bien sûr c’est une chance de pouvoir travailler. Quand le travail est là, il faut le prendre. Et si l’on veut en avoir pour demain, pour après-demain, il s’agit de le faire bien. Peut-être même un peu mieux que ce que l’on attend de moi, pour que le jour où l’entreprise resserrera les boulons, je ne fasse  pas partie de la première charrette.  
Tout cela se comprend. Mais combien d’entre nous  – avec des motivations hautement défendables évidemment – se retrouvent, en quelque sorte prisonniers de leur travail. Contraints à trouver des justifications auprès de leurs enfants de leurs conjoints et répétant à l’envi que si nous travaillons autant c’est « pour le bien de la famille » !!!

Et nous savons bien que ce n’est pas toujours vrai. Et que – les exemples ne manquent pas – que malgré cet acharnement, rien ne nous dit que nous ne ferons jamais l’expérience du chômage.  Le bouclier « travail » est devenu fragile lui aussi.

Le bouclier « maison ». Acquérir un bien immobilier : quel bonheur. Sécurité par excellence. Investissement idéal que l’investissement dans la pierre.
Personne ne me pourra plus jamais me mettre à la porte. Les murs et le toit me sont définitivement acquis. Bien sûr …
Mais une maison nécessite un entretien, un projet et il arrive si souvent  que le projet change ! Parce que le couple qui avait choisi d’acquérir son nid n’est plus couple … parce l’entretien est trop lourd à notre âge … parce que les enfants n’en ont pas véritablement envie … alors ce qui paraissait un acquis définitif se retrouve source de tension, de conflits …


On pourrait allonger cette liste encore longtemps … pour arriver toujours à la même conclusion : ces boucliers humains, aussi légitimes soient-ils, n’épuisent jamais notre aspiration à une véritable paix, à une véritable sérénité.



Revenons à Bach.
Pour Bach comme pour David,
Le véritable bouclier, c’est Dieu.

Mais pas un Dieu un Dieu airbag, pas un Dieu paratonnerre, pas un Dieu antibiotique à large spectre … Ce Dieu dont nous rêvons souvent parce qu’il fait tout le travail à notre place. ET que ça marche tout seul.

Vous avez remarqué que David ne dit pas « Dieu est un bouclier » ? Il dit « Dieu est mon bouclier ». Pas plus qu’il ne dit « Dieu est un berger » mais « Dieu est mon berger » ou pas davantage il ne dit « Dieu est une lumière », mais Dieu est ma lumière …

Dieu est « mon » bouclier.
Un bouclier, il faut que je le porte,
il faut que je le tienne,
il faut que je le place au bon endroit.
Si mon ennemi se trouve à droit et que je tiens mon bouclier à gauche, il ne me sera d’aucune utilité.
Un bouclier, au fond, c’est comme un parapluie, il faut que je décide comment je vais le tenir. Il faut que lui et moi soyons des partenaires. Un parapluie me protège de la pluie si nous travaillons ensemble.

Et puis un bouclier, ce n’est pas seulement militaire ! Ah non ? Bien sûr que non. Un bouclier, comme un parapluie, peut s’utiliser de différentes manières. Ou pour me défendre, me protéger des averses du ciel ou bien … pour recevoir, pour accueillir ce que les autres, ce que Dieu, ce que cette semaine, ce que demain,  pourrait m’offrir.

Amen.

Texte méditatif final

L’espoir
Ça vient d’on ne sait où
Ça va plus loin que nous

L’espoir
Ça nous colle à la peau
Ça nous enracine au ciel
Ça nous enlace les bras et les mains

L’espoir,
Ça nous étouffe
A en crever
A en crier
A en vivre
Sans fin

Fragile, si fragile
Comme la fleur du blé
Il ensemence nos chemins
Il nourrit nos après-demain
Et fait éclater nos rires
Plus loin que la terre

Ecrit en rouge sur les murs des prisons
Il se nomme : Liberté

Ecrit en noir, sur les portes des princes
Il se nomme : Justice

Ecrit en bleu, sur le gris de nos villes
Il se nomme : Horizon

Ecrit en blanc, sur les robes des filles
Il se nomme : Printemps

Ecrit en rose sur les fleurs de nos mains
Il se nomme : Fraternité

Ecrit en transparence dans les yeux des enfants
Il se nomme : Vivre

Ecrit en arc-en-ciel, sur le soleil couchant
Il se nomme : Demain.

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