Texte méditatif d’entrée

Hammaschiach kam ! Xristos anèsthy ! Christ est ressuscité !

La nature remplace et Dieu répare
le printemps parfois nous affole et la croix est une folie !
les saisons, inexorablement, se succèdent,
la terre nourrit puis inévitablement nous ensevelit,
Pâques, rompant avec la nature, nous traverse et bouleverse l’ordonnance de la mort…
Le ciel – le Très-Haut – féconde la vie, l’ouvre et la bénit…

Qu’est-ce que l’humain pour que tu prennes tant souci de lui ?
Qui a dit : il est bon pour vous que je m’en aille…
Et encore : je ne suis pas venu pour être servi mais pour servir ?
Qui appelle à la vie et renouvelle l’espérance ?
Qui a osé renvoyer dos à dos le politiquement et le religieusement correct ?

Se réjouir, invitera la cantate, nous réjouir parce qu’avec Pâques le Dieu qui nous aime prend les choses en mains
et inverse les valeurs : le dernier mot est à la Vie !
Il n’évite pas la mort et ne nous l’épargne pas
mais il remplit la vie de sens et fonde la confiance…

se réjouir… nous réjouir !
au cœur de notre mort, au cœur de notre vie :
IL EST LÀ !

Texte biblique : Luc 24/1-12

Les femmes qui avaient accompagné Jésus depuis la Galilée suivirent jusqu’au tombeau et regardèrent comment son corps avait été placé.

Puis elles rentrèrent à la maison, préparèrent parfums et onguents, et observèrent le jour du repos, le sabbat, selon le commandement…

A l’aube du dimanche, elles vinrent à la tombe avec les aromates préparés. Elles trouvèrent la pierre servant à fermer le tombeau roulée de côté…

Elles entrèrent et ne trouvèrent pas le corps du Seigneur Jésus… Or, comme elles en étaient troublées et perplexes, voici que deux hommes se présentèrent à elles en vêtements éblouissants. Saisies de crainte, elles avaient le regard baissé quand ils leur dirent : pourquoi cherchez-vous le Vivant parmi les morts ? Souvenez-vous comment il vous a parlé quand il était encore en Galilée : « il est nécessaire que le fils de l’homme soit livré aux mains des hommes en rupture, qu’il soit crucifié et que le troisième jour il se relève!»

Alors, elles se rappelèrent ses paroles. Elles revinrent du tombeau et rapportèrent tout cela aux Onze et à tous les autres. Elles ?… Il s’agissait entre autres de Marie la Magdalène, de Jeanne et de Marie de Jacques ; et leurs autres compagnes confirmèrent ces propos aux apôtres : mais, à leurs yeux, ces paroles parurent un vrai délire et ils ne croyaient pas ces femmes…

Un témoignage ajoute que Pierre partit au tombeau et qu’il ne vit, en se penchant, que les bandelettes ; puis qu’il s’en alla de son côté perplexe, s’étonnant de ce qui était advenu…

Brève prédication de Pâques

C’est extraordinaire, la force de la musique : non seulement elle nous fait sentir et ressentir, et donc comprendre en profondeur, mais, comme ce soir à travers cet aria de la soprano si pur, elle est capable de nous faire voir ! le Sauveur vit et règne en vous !En vous, en nous !

C’est surprenant – on aimerait presque dire : c’est fou ! – que le temps qui précède la naissance de Jésus et celui qui suit sa mort, soient exprimés en des termes complètement irrationnels ! Rappelez-vous : c’est l’ombre du St Esprit sur Marie qui le conçoit… et c’est un tombeau vide qui parle de sa vie au-delà de la mort… complètement irrationnelles ces images !…

Mais ce n’est pas par hasard… C’est bien, je crois, pour nous aider à quitter le terrain du vérifiable, de l’objectif, du rationnel, c’est pour nous arracher à l’illusion que l’amour pourrait s’expliquer, se démontrer, et que Dieu pourrait se prouver ! C’est pour nous permettre de nous ouvrir à une autre réalité, d’espérer autre chose que la répétition naturelle des choses et des êtres ! Pour vivre et voir autrement, pour laisser Dieu nous éveiller et nous habiter ! Il vit et règne en nous ! Bien sûr que la nature nous émerveille et que beaucoup disent y rencontrer Dieu ! mais le Christ vivant en nous, ce n’est pas la fête du printemps et le retour des violettes !

C’est le retournement, le grand renversement, c’est le ciel sur la terre, c’est la vie qui fait de l’ombre à la mort, parce que la mort a été assumée pleinement.

Alors, comment ne pas faire de cette vie de Dieu en nous une parenthèse printanière uniquement ?

D’abord, je crois, en faisant œuvre de mémoire : oui, nous souvenir, nous rappeler, comme les Hébreux se souvenaient de la libération d’Egypte, comme nos frères juifs s’en souviennent aujourd’hui encore à chaque fête de la Pâque, comme les chrétiens se souviennent, càd revivent, chaque premier jour de la semaine, chaque dimanche : faire mémoire comme à chaque fois que le repas de la cène est partagé ! Nous souvenir non pas avec notre tête seulement, mais avec nos cœurs, avec nos entrailles, lorsque nous REGARDONS le monde et les humains que nous rencontrons sur notre chemin… Ce que vous faites à l’un de ces plus petits d’entre mes frères, c’est à moi que vous le faites !… nous souvenir en réapprenant à voir.

Cela m’a rappelé cette histoire que raconte Tchekov :

Les cloches carillonnent dans un village de la steppe sibérienne : c’est Pâques, il soleille sur la neige encore dure. Les fidèles sortent de la célébration et échangent joyeusement la salutation pascale : Christ est ressuscité ! le paysan Dimitri est déjà installé dans sa troïka, le fouet à la main, sa femme à côté de lui, tenant sur ses genoux le gâteau béni qu’on doit partager en famille pour être fidèle à la tradition. Il fait claquer son fouet, le cheval prend le trot et la troïka glisse rapidement… Les passants crient la salutation de Pâques et Dimitri répond : Il est vraiment ressuscité !…

Tout est serein, l’air est cristallin, tout le monde est joyeux, la vie est belle…

Quand soudain, un homme en haillons, le visage ravagé, sort d’un fossé… C’est un cosaque ! dit le paysan. La troïka ralentit, s’arrête. Christ est ressuscité ! poursuit-il… Je le sais, dit le cosaque, mais moi je reviens de la guerre, je suis blessé et j’ai faim.

  • Femme, dit le paysan, donne-lui une bonne part du gâteau !
  • Comment, dit la femme, ne sais-tu pas mauvais chrétien que le gâteau pascal doit se partager en famille selon la sainte coutume ?… en route !…

Et pour la première fois, Dimitri entend vraiment la voix de sa femme qu’il croyait pourtant connaître.. Il la regarde et il voit son visage comme il ne l’avait jamais vu… Et voilà que le paysan ne fouette plus ni ne chante…

  • qu’as-tu à bouder ? dit la femme, des cosaques qui reviennent de la guerre, il y en a partout. Pour un cosaque que l’on sauve, il y en a tant d’autres…

A la ferme, le repas se déroule en silence ; Dimitri semble regarder à l’intérieur de lui-même, la femme s’irrite… Mais le paysan n’y tient plus. Il interpelle deux de ses domestiques : prenez la troïka, allez sur la route, vous trouverez un cosaque blessé, amenez-le ici !

Quelques minutes après, impatient, il selle son cheval et va à la rencontre des serviteurs qui lui disent : nous n’avons pas vu de cosaque… Dimitri rentre à la maison, sort la bouteille de vodka, s’en verse un grand verre et un autre encore. C’est à partir de ce jour qu’il n’eut plus le cœur à rien et qu’il se mit à boire et à dormir, si bien qu’il fallut vendre peu à peu et vendre encore. Sa femme partit, il devint un errant. Et quand ses anciens amis qui l’avaient connu au temps de sa prospérité, amoureux de sa terre, de sa femme, plein de cœur à l’ouvrage, lui disaient : mais enfin Dimitri qu’est-il donc arrivé ?… Ah, répondait-il, c’est ce cosaque qui ne me sort pas de la tête…

Ah ! ces bons sentiments refoulés qui nous rongent parfois ! : on ferme les yeux, on se bouche les oreilles pour rester tranquille, pense-t-on, dans le cercle étouffant des rites et des coutumes qui abandonnent parfois les autres sur le bord du chemin, blessés et faisant peur… Oh, je ne crois pas, je ne crois plus que la mauvaise conscience puisse faire reculer le mal, mais Pâques et toute son ouverture pourrait nous rendre capables de voir le cosaque qui est tout près… peut-être justement sur les bords du tombeau que nous célébrons vide…

Texte méditatif final

Au cœur de nos limites… un horizon ouvert !
Au cœur de la mort… une vie
Au cœur de la déchirure… une présence
Au cœur du doute… une confiance
Au cœur de l’indifférence… un engagement
Au cœur de l’abandon et de l’absence… un silence présent, présence silencieuse…

Quand la morsure tenaille à faire saigner l’espoir,
Quand l’adversaire nous raille parce que nous osons croire,
Il est bon de savoir que Dieu ne nous ment pas :
En relevant Jésus d’un tombeau nécessaire
Il nous relève aussi afin que sur la terre
Nous devenions amis au-delà des barrières,
Ne rêvant pas du ciel, mais le vivant ici :
Ciel et terre, peuple et Père, unis, réconciliés !
C’est à Lui qu’on le doit : joie et Alléluia !

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